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Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 21 bis.djvu/568

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dépeint le duc d’Epernon de vives couleurs, il concluoit que si elle se mettoit entre ses mains, elle seroit plus prisonnière qu’elle n’étoit au lieu où elle étoit ; que son humeur tyrannique lui devoit assez faire connoître la vérité de son avis, sans qu’il fallut de grandes raisons pour le prouver. Pour la détourner même de ce dessein, il lui offrit de la retirer en Bourgogne, dont Sa Majesté ne fit pas de cas : elle connoissoit trop la jalousie en laquelle ce personnage s’est nourri toute sa vie, et l’envie qu’il a de la gloire d’autrui, voire même de celle à laquelle il n’est pas capable d’aspirer, pour ajouter foi à ses avis. Il est bien vrai qu’elle appréhendoit l’humeur du duc d’Epernon ; mais elle étoit en un tel état, qu’elle savoit bien que tout autre lui seroit meilleur : elle savoit, en outre, très-bien qu’encore que le duc de Bellegarde fût capable de lui offrir retraite, il ne l’étoit pas de se résoudre à la lui donner, beaucoup moins de soutenir une telle action, quand même il la voudroit faire.

Comme rien ne la détourna du traité qu’elle avoit fait pour se retirer à Angoulême, rien ne put divertir aussi le duc d’Epernon de partir de Metz pour la venir servir en cette occasion. Il y étoit allé dès l’année précédente sur des mécontentemens imaginaires, mais en effet par la seule inquiétude de son naturel, qui ne peut supporter de voir personne au-dessus de lui, comme il témoigna assez, en ce que, peu auparavant son partement, rencontrant Luynes sur le degré du Louvre, il lui dit : Vous autres, messieurs, vous montez, et nous, nous descendons.

Il ne fut pas plutôt à Metz qu’il y fit des siennes, et se comporta si violemment envers la justice, que