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quelles étoit mariée à l’électeur de Brandebourg, et l’autre au duc de Neubourg, l’Empereur, selon la coutume ordinaire de la maison d’Autriche, qui ne perd aucune occasion de s’agrandir sous des prétextes spécieux, envoya si promptement, après la mort du duc de Juliers, l’archiduc Léopold avec ses armes, qu’il se saisit de la place dont il portoit le nom, comme si tout ce qui relève de l’Empire y devoit être réuni faute d’héritiers masculins.

S’agissant en cette rencontre de protéger le foible contre la puissance qui étoit lors la plus redoutée dans l’Europe, de maintenir une cause dont le droit étoit si clair que les prétentions au contraire n’avoient pas même d’apparence, ce n’est pas sans raison que je dis que cette occasion étoit assez importante pour être seule la cause du préparatif de si grandes armées que le Roi mettoit sur pied. Mais cependant la sincérité que l’histoire requiert m’oblige à ajouter que non-seulement estimé-je que les autres desseins que j’ai rapportés ci-dessus, fondés en la justice qui donne droit à tout prince de reconquérir ce qui lui appartient, doivent être joints aux motifs de ses armes, mais encore que l’amour n’étoit pas la dernière cause de ce célèbre voyage ; car il est vrai qu’il vouloit se servir de cette occasion à contraindre l’archiduc à lui remettre madame la Princesse[1] entre les mains. Sur quoi il est impossible de ne considérer pas en ce lieu combien cette passion, ordinaire presque à tous les hommes, est dangereuse aux princes, quand elle les porte à l’excès d’un aveuglement dont les

  1. Madame la Princesse : Henriette-Charlotte de Montmorency, princesse de Condé.