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DE LA DUCHESSE DE NEMOURS. [1648]

c’est à cela aussi que l’on attribue le commencement de ce qu’on a nommé Fronde, dont la principale source vint du mépris qu’on avoit pour le cardinal, fondé particulièrement sur son humeur foible et craintive, que l’on commença de connoître et de découvrir dès le commencement de la régence, par la foiblesse qu’il eut de consentir à la déposition d’un homme[1] que la Reine avoit pourvu de la cure de Saint-Eustache, pour y mettre en sa place le neveu de celui qui y étoit avant lui, lequel, par de très-grandes aumônes et par une vie toute pleine de piété, avoit tellement gagné le cœur de tous ses paroissiens que, dès qu’il fut mort, tout le peuple des halles, jusqu’aux harangères, alla en foule et en tumulte faire entendre à la Reine et au cardinal qu’ils vouloient avoir son neveu pour leur curé, et qu’ils étoient résolus de n’en point souffrir d’autre. La Reine et le cardinal eurent assez de foiblesse pour consentir à ce qu’ils demandoient avec tant d’insolence : ce qui fit dire en ce temps-là, à bien des gens de bon esprit que cet exemple de la foiblesse du cardinal seroit d’une pernicieuse conséquence, comme on ne l’éprouva que trop dans la suite.

Cette foiblesse du cardinal, jointe à la certitude avec laquelle ceux du parlement comptoient sur les suffrages du peuple, par le soin qu’eux-mêmes prenoient de lui persuader l’attachement qu’ils avoient à ses intérêts, contribua encore beaucoup à les rendre

  1. À la déposition d’un homme : Mazarin fit cette concession en 1644. Le neveu du curé de Saint-Eustache s’appeloit Merlin ; et les femmes de la halle, qui furent présentées à la Régente, lui dirent que les Merlins avoient été leurs curés de père en fils.