Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 37.djvu/115

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

faute de ce prince fut grande, de n’avoir pas prévenu les mauvaises intentions de ses rebelles sujets, qu’il falloit toujours gagner par la vigilance, plutôt que d’attendre de recevoir les premiers coups de leurs mains. Il n’étoit pas temps alors de s’amuser avec la Reine sa femme. Voilà peut-être comme on peut dire qu’elle étoit cause du malheur du Roi son mari.

La Reine fut bien reçue en Hollande par Henri, prince d’Orange ; et comme il étoit aimé et respecté des États, cette princesse y reçut à sa considération toutes sortes de bons traitemens, de respects et de services de la part de son fils ; car pour les bourgmestres, ils ne révèrent pas beaucoup la royauté. Ces hommes, peu accoutumés à la soumission et à l’obéissance due aux têtes couronnées, se venoient asseoir auprès d’elle dans des chaises, et se mettoient en conversation avec elle de la même manière qu’ils en usoient avec leurs égaux à La Haye. Ils entroient où elle étoit, le chapeau sur la tête ; et après l’avoir regardée, ils s’en retournoient sans la saluer. La petite princesse, qui n’avoit que dix ans, demeura comme un enfant auprès de la Reine sa mère ; et le prince de même, qui n’en avoit que quatorze, ne songeoit qu’à bien employer cet âge sous la conduite de ses maîtres qui étoient en grand nombre, le prince son père le voulant rendre digne successeur de ses ancêtres.

La Reine demeura une année tout entière en ce pays ; et toute son occupation fut d’envoyer au Roi son mari de l’argent et des armes. Elle y mit ses pierreries en gage, et avec ce qu’elle put avoir des États et du prince d’Orange, elle envoya au Roi son mari de quoi armer quarante mille hommes. Ce qui lui