Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 37.djvu/12

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d’examiner, et qu’elle ne garda pas trop exactement, parce qu’elle ne connoissoit pas encore le prix de ses libéralités, que chacun se pressoit de lui demander trop hardiment, et qu’elle avoit trop de peine à refuser. Le duc de Vendôme, et toute sa famille, avoit jusques-là gagné plus que personne à la mort du feu Roi, et particulièrement le duc de Beaufort son cadet ; car la Reine, dans les derniers jours de la maladie du Roi, lui avoit confié la garde de ses enfans. L’éclat de cette confiance attira tant de gens à sa suite, qu’il parut quelque temps le maître de la cour.

La Reine eut intention en ce temps-là d’ôter le gouvernement du Havre à la duchesse d’Aiguillon, et de le donner au prince de Marsillac, ami de madame de Chevreuse et de la dame de Hautefort, qui étoit fort bien fait, avoit beaucoup d’esprit et de lumières, et dont le mérite extraordinaire le destinoit à faire une grande figure dans le monde. Cette duchesse, nièce du cardinal de Richelieu, qui en avoit fait une si belle pendant le ministère de son oncle, commandoit dans cette place, et ce gouvernement lui avoit été laissé par lui, du consentement du feu Roi, pour le garder à ses neveux. Cette dame, qui par ses belles qualités surpassoit en beaucoup de choses les femmes ordinaires, sut si bien défendre sa cause, qu’elle persuada quasi à la Reine qu’il étoit nécessaire pour son service qu’elle lui laissât cette importante place, lui disant que, n’ayant plus en France que des ennemis, elle ne pouvoit trouver de sûreté ni de refuge que dans la protection de Sa Majesté, qui en seroit toujours la maîtresse ; qu’au contraire celui auquel elle vouloit donner ce gouvernement avoit trop d’esprit, qu’il