Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 37.djvu/131

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manquoit de belles et grandes connoissances qu’on peut acquérir par la lecture : ses malheurs avoient réparé ce défaut, et de fâcheuses expériences lui avoient donné de la capacité. Nous la verrons en France perdre cette couronne chancelante qu’elle portoit encore, perdre le Roi son mari d’une mort effroyable, et souffrir constamment toutes les adversités qu’il a plu à Dieu lui envoyer.

Les cabinets des rois sont des théâtres où se jouent continuellement des pièces qui occupent tout le monde : il y en a qui sont simplement comiques ; il y en a aussi de tragiques, dont les plus grands événemens sont toujours causés par des bagatelles. Après avoir parlé des horribles effets de la fortune, et de l’indolence avec laquelle elle se moquoit des têtes couronnées, il faut remarquer ici ceux que produit cette folle passion, qui ne se contente pas d’intrigues de plaisir, mais, se mêlant dans toutes les affaires les plus sérieuses, ne manque jamais de faire de grands désordres quand elle est maîtresse du cœur des hommes. Mademoiselle de Boutteville-Montmorency, fille de Boutteville qui avoit eu la tête tranchée pour s’être battu en duel contre l’expresse défense du roi Louis xiii, étoit aimée du comte de Châtillon appelé Dandelot. Il étoit frère de Coligny, qui s’étoit battu contre le duc de Guise, ainsi que je l’ai écrit. Le maréchal et la maréchale de Châtillon, ses père et mère, s’opposèrent à cette inclination, tant à cause que mademoiselle de Boutteville n’étoit pas riche que parce qu’elle étoit catholique ; si bien qu’ils voyoient par ce mariage leur famille dans un engagement qu’ils appréhendoient infiniment. Pour y remédier, ils désiroient que leur