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songeoit plus à elle que pour lui faire des outrages[1].

[1644] Voyons accomplir en la personne de madame de Hautefort la destinée de toute la troupe des importans. La Reine avoit quitté le Louvre à cause que son appartement ne lui plaisoit pas, et avoit pris pour sa demeure le Palais-Royal, que le cardinal de Richelieu en mourant avoit laissé au feu Roi. Dans le commencement qu’elle occupa ce logis, elle fut fort malade d’une jaunisse effroyable, qui fut jugée par les médecins ne provenir que de chagrins et de tristesse. Les chagrins qu’elle avoit reçus de tant de plaintes qui se faisoient contre son gouvernement lui avoient donné de la peine. L’occupation des affaires lui causa beaucoup d’embarras ; et la douleur qu’elle sentit, se voyant forcée de faire des malheureux, lui fit une si grande impression que son corps, participant aux

  1. Pour lui faire des outrages. Le manuscrit ajoute : « Pendant notre régence, nous l’avons vu amoureux d’une fille de la Reine, qu’il montrait de vouloir épouser ; et on parloit de ce mariage aussi bien que s’il n’eût point été marié. Mademoiselle de Pons, qui n’étoit pas fâchée d’avoir un amant sous figure d’un mari, a maintenu longtemps cette illusion comme une chose réelle. Nous l’avons vue depuis quitter la cour pour vivre sous les ordres de ce prince. Plusieurs années se sont passées sous ce prétexte fabuleux : elle a été long-temps son amie ; enfin le détrompement et la haine ont suivi cette amitié. Pour la comtesse de Bossu, elle est venue souvent de Flandre en France chercher son mari, rebutée de madame de Guise la mère, et chassée de ce royaume, tantôt par les ordres de la Reine, tantôt par elle-même. Cette amante désolée donna dans le commencement de la compassion à tous ceux qui la virent, car elle étoit belle et malheureuse ; et sa nécessité fut telle dans son premier voyage, qu’il fallut que les dames de Normandie lui donnassent de quoi retourner dans son pays. Dans les derniers elle perdit ses avantages, en faisant voir qu’elle étoit femme ; et même j’ai ouï dire que, sans la jalousie, il y aurait eu alors de favorables momens pour elle dans l’ame de ce prince. »