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forçant de le mettre dans une place d’où vraisemblablement il paroissoit devoir bientôt monter à la première. La Reine trouva mauvais qu’on donnât à ce retour tant de marques de joie publique, et me fit l’honneur de me dire alors qu’elle ne savoit pas pourquoi on faisoit tant de bruit de cet homme, et qu’on se trompoit d’espérer qu’il fût jamais plus que ce qu’il étoit. Comme en effet elle considéroit son ministre, et qu’elle trouvoit qu’il étoit de son devoir et de sa gloire de le soutenir, cet applaudissement fut cause qu’elle se fortifia contre les amateurs de la nouveauté. Elle forma le dessein d’empêcher que le garde des sceaux de Châteauneuf, son ancien serviteur, qui avoit été disgracié par cette seule raison, ne parvînt au dessein qu’il avoit de lui dérober sa confiance lorsqu’elle ne vouloit pas la lui donner.

Le cardinal, qui avoit de grands désirs de se soutenir dans la place qu’il avoit, fit bonne mine à son rival, et ne montra point le craindre. Il lui offrit sa maison, il voulut qu’il y logeât quelque temps, et le traita si aimablement qu’il l’obligea à se louer de lui, et à publier hautement qu’il lui étoit redevable, et qu’il étoit son serviteur et son ami. La Reine, pour gratifier la Fronde de toutes manières, confirma au fils de Broussel le gouvernement de la bastille, qu’il avoit usurpé pendant la guerre. Elle fit venir en plein cercle cet homme qui lui avoit donné de si mauvaises heures, et le traita bien. Toutes ces choses se firent par le conseil du cardinal, et selon sa politique ordinaire qui étoit de gagner Le temps et de dissimuler.

Ensuite de l’établissement du garde des sceaux de Châteauneuf, la Reine se résolut d’aller en Bour-