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DU CARDINAL DE RETZ.

cardinal. Si j’avois été de l’entreprise d’Amiens, je n’aurois pas fait, au moins à ce que je crois, comme ceux qui ont manqué leur coup. Je suis de celle de Paris, elle est immanquable. J’y ai bien pensé. Voilà ce que j’ai ajouté à notre plan. » En finissant ce mot, il me coula dans la main un papier écrit des deux côtés, dont voici la substance : « Qu’il avoit parlé à M. le maréchal de Vitry, qui étoit dans toutes les dispositions du monde de servir M. le comte ; qu’ils répondoient l’un et l’autre de se rendre maîtres de la Bastille, où toute la garnison étoit à eux ; qu’ils répondoient aussi de l’Arsenal ; qu’ils se déclareroient aussitôt que M. le comte auroit gagné une bataille, à condition que je leur fisse voir au préalable, comme je l’avois avancé à lui comte de Cramail, qu’ils seroient soutenus par un nombre considérable d’officiers, des colonels de Paris. » Cet écrit contenoit ensuite beaucoup d’observations sur le détail de la conduite de l’entreprise, et même beaucoup de conseils qui regardoient celle de M. le comte. Ce que j’y admirois le plus fut la facilité que ces messieurs eussent trouvée à l’exécution.

Il falloit bien que la connoissance que j’avois du dedans de la Bastille, par l’habitude que j’avois avec eux, me l’eût fait croire possible, puisqu’il m’étoit venu dans l’esprit de la leur proposer. Mais je vous confesse que quand j’eus examiné le plan de M. le comte de Cramail, qui étoit un homme d’une grande expérience et de très-bon sens, je faillis à tomber de mon haut, en voyant que des prisonniers disposoient de la Bastille avec la même liberté qu’eût pu prendre le gouverneur le plus autorisé dans sa place.