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MÉMOIRES

Comme toutes les circonstances extraordinaires sont d’un merveilleux poids dans les révolutions populaires, je fis réflexion que celle-ci, qui l’étoit au dernier point, feroit un effet admirable dans la ville, aussitôt qu’elle y éclateroit. Et comme rien n’anime et n’appuie plus un mouvement que le ridicule de ceux contre lesquels on le fait, je connus qu’il nous seroit aisé d’y tourner de tout point la conduite d’un ministre capable de souffrir que des prisonniers fussent en état de l’accabler, pour ainsi dire, de leurs propres chaînes. Je ne perdis pas le temps dans les suites, je m’ouvris à feu M. d’Etampes, président du grand conseil, et à M. L’Ecuyer, présentement doyen de la chambre des comptes, tous deux colonels, et fort autorisés parmi les bourgeois ; et je les trouvai tels que M. le comte me l’avoit dit : c’est-à-dire passionnés pour ses intérêts, et persuadés que le mouvement n’étoit pas seulement possible, mais qu’il étoit même facile. Vous remarquerez, s’il vous plaît, que ces deux génies, très-médiocres même dans leur profession, étoient d’ailleurs peut-être les plus pacifiques qui fussent dans le royaume. Mais il y a des feux qui embrasent tout : l’importance est d’en connoître et d’en prévoir le moment.

M. le comte m’avoit ordonné de ne me découvrir qu’à ces deux hommes dans Paris. J’y en ajoutai de moi-même deux autres, dont l’un fut Parmentier, substitut du procureur général et l’autre L’Epinay, auditeur de la chambre des comptes. Parmentier étoit capitaine du quartier de Saint-Eustache, qui regarde la rue des Prouvelles, considérable par le voisinage des halles. L’Epinai y commandoit, comme lieutenant,