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rappiochemens singuliers et de ces figures étranges qui étoient à la mode dans le temps : s’ils manquoient d’onction, ils se faisoient admirer par la force des idées ; enfin ils annonçoient un homme habile et plein de talent, plutôt qu’un orateur chrétien. Le coadjuteur avoit calculé l’effet de cette démarche inattendue. « Le grand secret de ceux qui entrent dans les affaires, observe-t-il, est de saisir d’abord l’imagination des hommes par une action que quelque circonstance leur rende particulière. » En effet, la réputation qu’il acquit tout à coup comme prédicateur contribua beaucoup à augmenter le nombre de ses partisans.

À la même époque, et dans la première année de la régence d’Anne d’Autriche, il s’étoit formé contre le cardinal Mazarin, à qui elle accordoit toute sa confiance, un parti fort bruyant, mais peu redoutable. C’étoit le parti des importans, à la tête duquel figuroit le duc de Beaufort, qui fut bientôt arrêté et renfermé dans le château de Vincennes (2 septembre). Le coadjuteur refusa d’entrer dans cette intrigue, en donnant pour raison qu’il avoit à la Reine des obligations trop récentes ; mais, en effet, parce qu’il regardoit les chefs de cette faction comme de vrais extravagans. Cependant, lorsqu’il affectoit tous les dehors d’une fidélité incorruptible, il continuoit de s’attacher des hommes de toutes les classes par d’immenses libéralités. Un de ses amis lui ayant reproché l’imprudence de cette conduite : « J’ai bien supputé, répondit-il ; César, à mon âge, devoit six fois plus que moi. » En même temps il se lioit avec les jansénistes, parti formé sous le règne précédent, et très-disposé à favoriser toutes les oppositions. Il com-