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MÉMOIRES

et d’Arragon, par des lois écrites : elle a été seulement tempérée par des coutumes reçues, et comme mises en dépôt au commencement dans les mains des États-généraux, et depuis dans celles des parlemens. Les enregistremens des traités faits entre les couronnes, et les vérifications des édits pour les levées d’argent, sont des images presque effacées de ce sage milieu que nos pères avoient trouvé entre la licence des rois et le libertinage des peuples. Ce milieu a été considéré par les sages et les bons princes comme un assaisonnement de leur pouvoir, très-utile même pour le faire goûter aux sujets : il a été regardé par les malhabiles et les malintentionnés comme un obstacle à leurs déréglemens et à leurs caprices. L’histoire du sire de Joinville nous fait voir clairement que saint Louis l’a connu et estimé ; et les ouvrages d’Oresme, évêque de Lizieux, et du fameux Juvénal des Ursins, nous convainquent que Charles V, qui a mérité le titre de Sage, n’a jamais cru que sa puissance fût au dessus des lois et de son devoir. Louis XI, plus artificieux que prudent, donna sur ce chef, aussi bien que sur tous les autres, atteinte à la bonne foi. Louis XII l’eût rétablie, si l’ambition du cardinal d’Amboise[1], maître absolu de son esprit, ne s’y fût opposée. L’avarice insatiable du connétable de Montmorency[2] lui donna bien plus de mouvement à étendre l’autorité de François I, qu’à la régler. Les vastes et lointains desseins de messieurs de Guise ne leur permirent pas sous François II de penser à y don-

  1. Georges d’Amboise, premier du nom, cardinal en 1498, premier ministre d’État de Louis XII ; mort en 1510 (A. E.)
  2. Anne de Montmorency, connétable en 1538 ; mort en 1567. (A. E.)