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DU CARDINAL DE RETZ. [1649]

me, et qui l’avoit été voir sur le midi, lui avoit confirmé tout ce que je lui avois dit la veille, de la pente que ce corps prenoit sans s’en apercevoir soi-même ; et que le même Longueil étoit convenu avec lui que le seul remède efficace étoit de penser de bonne heure à le purger. Ce fut son mot, et je l’eusse reconnu à ce mot. Il n’y a jamais eu d’esprit si décisif ni si violent ; mais il n’y en a jamais eu qui ait pallié ses décisions et ses violences par des termes plus doux. Quoique le même expédient que M. de Bouillon me proposoit me fût déjà venu dans l’esprit, et peut-être avec plus de raison qu’à lui, parce que j’en connoissois la possibilité plus que lui, je ne lui laissai aucun lieu de croire que j’y eusse fait réflexion, parce que je savois qu’il avoit le foible d’aimer à avoir imaginé une chose le premier ; et c’est l’unique défaut que je lui aie connu dans la négociation. Après qu’il m’eut bien expliqué sa pensée, je le suppliai d’agréer que je lui misse la mienne par écrit : ce que je fis sur-le-champ ainsi :

« Je conviens de la possibilité de l’exécution, mais je la tiens pernicieuse pour les suites, et pour le public et pour les particuliers ; parce que ce même peuple dont vous vous serez servi pour abattre l’autorité des magistrats ne reconnoîtra plus la vôtre, dès que vous serez obligé de demander ce que les magistrats en exigent. Ce peuple a adoré le parlement jusqu’à la guerre : il veut encore la guerre, et il a commencé à n’avoir plus tant d’amitié pour le parlement. Il s’imagine lui-même que cette diminution ne regarde que quelques membres de ce corps qui sont maza-