Aller au contenu

Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 45.djvu/124

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
121
DU CARDINAL DE RETZ. [1650]

Cet homme se perdra, et perdra peut-être l’État, pour les beaux yeux de M. de Candale. »

Le jour que Senneterre prononça cet oracle les nouvelles arrivèrent que messieurs de Bouillon et de La Rochefoucauld avoient fait entrer dans Bordeaux madame la princesse et M. le duc que le cardinal avoit laissé entre les mains de madame sa mère, au lieu de le faire nourrir auprès du Roi, comme Servien le lui avoit conseillé. Le parlement de cette ville, dont le plus sage et le plus vieux jouoit en ce temps-là gaîment tout son bien en une soirée, sans faire tort à sa réputation, eut, en une même année, deux spectacles assez extraordinaires. Il vit un prince et une princesse du sang à genoux au bureau, lui demandant justice ; et il fut assez fou, si on peut parler ainsi d’une compagnie en corps, pour faire exposer sur le même bureau une hostie consacrée, que des soldats des troupes de M. d’Epernon avoient laissé tomber d’un ciboire qui avoit été volé.

Le parlement de Bordeaux ne fut pas fâché de ce que le peuple avoit donné entrée à M. le duc ; mais il garda pourtant beaucoup plus de mesures qu’il n’appartenoit au climat gascon, et à l’humeur où il étoit contre M. d’Epernon. Il ordonna que madame la princesse, M. le duc, messieurs de Bouillon et de La Rechefoucauld auroient la liberté de demeurer dans Bordeaux, à condition qu’ils donneroient leur parole de n’y rien entreprendre contre le service du Roi et que cependant la requête de madame la princesse seroit envoyée à Sa Majesté ; et que très-humbles remontrances lui seroient faites sur la détention de messieurs les princes. Le président de Gourgues dé-