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DU CARDINAL DE RETZ. [1650]

imprudence ; qu’il falloit qu’il y eût de la mauvaise intention ; qu’il me vouloit découvrir un secret sur lequel il ne s’étoit jamais expliqué ; que le cardinal lui avoit fait deux perfidies terribles en sa vie ; qu’il y en avoit une dont il ne s’ouvriroit jamais à personne. Voici l’autre. Dans l’accommodement qu’il fit avec M. le prince touchant le Pont-de-l’Arche, il étoit expressément porté que s’il arrivoit que lui Monsieur eût quelque chose à démêler avec M. le prince, il se déclareroit contre lui, et ne marieroit même aucune de ses nièces sans le consentement de M. le prince. Monsieur ajouta encore deux ou trois conditions aussi engageantes que j’ai oubliées, avec des opprobres contre La Rivière, qui le trahissoit, me dit-il, pour les deux autres, et qui les trahissoit pourtant tous trois. Monsieur continua à s’emporter contre le cardinal, jusqu’au point de me dire qu’il perdroit l’État en se perdant soi-même, et qu’il nous perdroit tous avec lui ; qu’il remettroit M. le prince sur le trône. Je vous assure que s’il m’eût plu ce jour-là de pousser Monsieur, je n’eusse pas eu peine à lui faire prendre des vues peu favorables à la cour ; mais je me crus obligé à la conduite contraire, parce que, dans l’éloignement où elle étoit, la moindre apparence qu’il eût donnée de son mécontentement eût été capable de l’empêcher de se rapprocher, et peut-être même de la porter à se raccommoder avec M. le prince. Je répondis à Monsieur que je n’excusois pas le procédé de M. le cardinal, qui étoit insoutenable : mais que j’étois persuadé toutefois qu’il n’avoit pas un aussi mauvais principe que celui qu’il lui donnoit ;