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[1651] MÉMOIRES

mais M. le prince en conçut la conséquence, et je vis clairement que ce pas de ballet l’avoit surpris. Madame la palatine l’observa mieux que personne, et vous le verrez dans la suite. Je me retirai dans mon cloître de Notre-Dame, où je ne m’abandonnai pas si fort à la Providence, que je ne me servisse aussi des moyens humains pour me défendre de l’insulte de mes ennemis.

Annery avec la noblesse du Vexin me rejoignit ; Chateaubriand, Château-Renaud, le vicomte de Lamet, Argenteuil, le chevalier d’Humières, se logèrent dans le cloître ; Balantin et le comte de Craffort, avec cinquante officiers écossais qui avoient été des troupes de Montross, furent distribués dans les maisons de la rue Neuve qui m’étoient les plus affectionnées. Les colonels et les capitaines du quartier qui étoient dans mes intérêts eurent chacun leur signal et leur mot de ralliement. Enfin je me résolus d’attendre ce que le chapitre des accidens produiroit, en remplissant exactement les devoirs de ma profession, et en ne donnant plus aucune apparence d’intrigues du monde. Jouy ne me voyoit qu’en cachette ; je n’allois plus que la nuit à l’hôtel de Chevreuse avec Malclerc ; je ne voyois plus que des chanoines et des curés. La raillerie en étoit forte au Palais-Royal et à l’hôtel de Condé. Je fis faire en ce temps-là une volière dans une croisée, et Nogent en fit le proverbe : Le coadjuteur siffle les linotes. La disposition de Paris me consoloit fort du ridicule du Palais-Royal ; j’y étois très-bien, et d’autant mieux que tout le monde y étoit fort mal. Les curés, les habitués, les mendians avoient été informés avec soin des négociations de M. le prince.