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DU CARDINAL DE RETZ. [1651]

tion ; de faire M. de Châteauneuf chef du conseil, et de donner la surintendance des finances à M. de Le Vieuville. La Reine me fit commander, une heure après que la dépêche de Brulh fut déchiffrée, de l’aller trouver entre minuit et une heure. Elle me fit voir le déchiffrement, qui me parut être véritable ; elle me témoigna une joie sensible des sentimens où elle voyoit M. le cardinal ; elle me fit promettre de les mettre dans leur plus beau jour, en en rendant compte à Monsieur, et d’adoucir son esprit sur son sujet le plus qu’il me seroit possible. « Car je vois bien, ajouta-t-elle, qu’il n’y a que lui qui vous retienne ; et que si vous n’aviez pas cet engagement, vous seriez mazarin. Je fus très-aise d’en être quitte à si bon marché. Je lui répondis que j’étois au désespoir d’être engagé, et que je n’y trouvois de consolation que la croyance où j’étois que je serois par cet engagement moins inutile à son service que par ma liberté. La Reine me dit ensuite que l’avis du maréchal de Villeroy étoit qu’elle attendît la majorité du Roi, qui étoit fort proche, pour faire éclater le changement qu’elle avoit résolu pour les places du conseil, parce que ce nouvel établissement qui seroit très désagréable à M. le prince, tireroit encore de la dignité et de la force d’une action qui donne un nouvel éclat à l’autorité royale. « Mais, repartit-elle tout à coup, ilfandroit par la même raison remettre votre nomination ; M. de Châteauneuf est de ce sentiment. » Elle sourit à ce mot, et elle me dit : « Non, la voici en bonne forme il ne faut pas donner le temps à M. le prince de cabaler contre vous à Rome. » Je répondis ce que vous vous pouvez imaginer à la Reine, qui