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[1651] MÉMOIRES

voyez de plus le plaisir qu’il y a d’agir entre tous ces gens-là. La Reine dit avant-hier qu’il faut qu’elle ou le prince quitté le pavé : elle veut aujourd’hui que je l’y ramène, et que je m’engage d’honneur au parlement pour sa sûreté. M. le prince sortit hier au matin de Paris pour s’empêcher d’être arrêté ; et je gage qu’il y reviendra avant qu’il soit deux jours, de la manière que cela tourne. Je veux m’en aller à Blois, et me moquer de tout. »

Comme je connoissois Monsieur, et que je savois de plus que Valois, qui étoit à lui, mais qui étoit serviteur de M. le prince, avoit dit la veille que l’on se tenoit à Saint-Maur très-assuré du palais d’Orléans, je ne doutai point que la colère de Monsieur ne vînt de son embarras, et que son embarras ne fût l’effet des avances qu’il avoit faites lui-même à M. le prince, dans la pensée qu’elles ne l’obligeroient jamais à rien parce qu’il étoit persuadé qu’il ne reviendroit plus à la cour. Comme il vit que la Reine, au lieu de prendre le parti de le pousser, lui offroit des sûretés au cas qu’il voulût retourner à Paris, et que cette conduite lui fit croire qu’elle seroit capable de mollir sur la proposition de joindre à l’éloignement du cardinal celui de Lyonne, Servien et Le Tellier, il s’effraya ; il crut que M. le prince reviendroit au premier jour à Paris, et qu’il se serviroit de la foiblesse de la Reine, non pas pour pousser effectivement les ministres, mais pour faire sa cour en se raccommodant avec elle, et en tirant ses avantages particuliers pour prix des complaisances qu’il auroit pour elle en les rappelant. Monsieur crut, sur ce fondement, qu’il ne pouvoit trop ménager la Reine, qui lui avoit fait la