Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 45.djvu/360

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l’émotion des esprits fit qu’on le reçut pour aussi bon que s’il eût été bien véritable ; que cette émotion, quoique grande, n’empêcha pas que beaucoup de gens ne fissent une sérieuse réflexion sur ce que M. Lainé avoit expliqué clairement dans son avis, et sur ce que j’avois touché dans le mien, de l’atteinte donnée à l’autorité royale que Monsieur, qui s’en aperçut, eut regret d’avoir été si vite, et crut qu’il pouvoit avec sûreté, et sans se perdre dans le public, se mitiger un peu. Quelle foule de mouvemens tout opposés ! quelle contrariété ! quelle confusion ! on l’admire dans les histoires, on ne la sent pas dans l’action. Rien ne paroissoit plus ordinaire que ce qui se faisoit et se disoit ce jour-là. J’y ai fait depuis réflexion, et je confesse que j’ai encore peine à comprendre, à l’heure qu’il est, la multitude, la variété et l’agitation des mouvemens que ma mémoire me représente. Comme en opinant on retomboit à la fin à peu près dans le même avis, on ne sentoit presque pas ce mouvement et je me souviens que Deslandes-Payen me disoit au lever de la séance : « C’est une belle chose que de voir une compagnie aussi unie ! » Remarquez, s’il vous plaît, que Monsieur, qui avoit plus de discernement, s’aperçut très-bien qu’elle l’eût été si peu en cas de besoin, qu’il m’avoua que tous ces mêmes hommes qui parloient si uniformément, à la réserve de fort peu d’entre eux, qu’il sembloit qu’ils eussent été concertés ; qu’il m’avoua, dis-je, que ces mêmes hommes eussent tourné à lui, s’il se fût déclaré contre la proposition. Il entremet de ne l’avoir pas fait ; mais il eut honte, et avec raison, de changer : et il se contenta de me commander de faire dire à la Reine par madame la palatine,