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qu’il espéroit qu’il trouveroit lieu d’adoucir son avis. La réponse de la Reine fut que je me trouvasse à minuit à l’oratoire. Elle me parut aigrie au dernier point de ce qui s’étoit passé le matin au Palais elle traita Monsieur de perfide ; elle ne me tira de pair que pour me faire encore plus sentir qu’elle ne me traitoit pas mieux dans le fond de son cœur. Il ne me fut pas difficile de me justifier, et de lui faire voir que je n’avois ni pu ni dû m’empêcher d’opiner comme j’avois fait, et comme je ne lui avois pas célé auparavant à elle-même. Je la suppliai d’observer que mon avis n’étoit pas moins contre M. le prince que contre M. le cardinal. Je lui excusai même la conduite de Monsieur, autant qu’il me fut possible, sur ce qu’en effet il ne lui avoit pas promis d’opiner pour les ministres ; et comme je vis que les raisons ne faisoient aucun effet, et que la préoccupation, dont le propre est de s’armer particulièrement contre les faits, tirait même ombrage de ceux qui lui devoient être les plus clairs, je crus que l’unique moyen de les lever seroit d’éclaircir le passé par l’avenir, parce que j’avois éprouvé plusieurs fois que le seul remède contre les préventions est l’espérance. Je flattai la Reine de celle que Monsieur se radouciroit dans la suite de la délibération, qui devoit encore durer un jour ou deux ; et comme je prévoyois que cet adoucissement de Monsieur ne seroit pas au point qui seroit nécessaire pour conserver les sous-ministres, je prévins ce que je disois avec un peu trop d’exagération de son effet, par une proposition qui me disculpoit par avance de celui qu’elle n’auroit pas. Cette conduite est toujours bonne, quand on agit avec des gens dont le génie n’est ca-