Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 45.djvu/39

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
36
[1649] MÉMOIRES

sance pour moi, et qui commença à m’en faire espérer de l’amitié. Madame de Chevreuse venoit de Bruxelles, et elle en venoit sans permission. La Reine s’en fâcha et lui envoya un ordre de sortir de Paris dans vingt-quatre heures. Laigues me le vint dire aussitôt ; j’allai avec lui à l’hôtel de Chevreuse, et je trouvai la belles à sa toilette, dans les pleurs. J’eus le cœur tendre, et je priai madame de Chevreuse de ne point obéir que je n’eusse eu l’honneur de la revoir. Je sortis en même temps pour chercher M. de Beaufort, à qui je persuadai qu’il n’étoit ni de notre honneur ni de notre intérêt de souffrir le rétablissement des lettres de cachet, qui n’étoit pas le moins odieux des moyens dont on s’étoit servi pour opprimer la liberté publique. Je jugeai bien que nous n’étions pas trop bons et lui et moi pour relever une affaire de cette nature, qui, bien que dans les lois et vraiment importante à la sûreté, ne laissoit pas d’être délicate le lendemain d’une paix, et par rapport à cette dame, la personne du royaume la plus convaincue de factions et d’intrigues. Je croyois, par cette raison qu’il étoit de la bonne conduite que cette escarmouche, que nous ne pouvions ni ne devions éviter, quoiqu’elle eût ses inconvéniens, se fît plutôt par M. de Beaufort que par moi. Il s’en défendit avec opiniâtreté, et il fallut me charger de cette commission, parce qu’elle devoit être exécutée au moins par l’un de nous deux pour faire quelque effet dans l’esprit du premier président. J’y allai en sortant de chez M. de Beaufort et comme je commençois à lui représenter la nécessité qu’il y avoit à ne pas aigrir les esprits par l’infraction des déclarations si solennelles, il m’arrêta tout court, en