Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 46.djvu/116

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est ressouvenu toute sa vie ; et lorsqu’il revint en Lorraine, le premier compliment qu’il me fit faire par M. l’abbé de Saint-Mihiel fut qu’il ne doutoit pas que nous nous entendrions dorénavant l’un et l’autre, bien mieux que nous ne nous étions entendus au noviciat à Paris. J’eusse eu tort, pour vous dire le vrai, de m’expliquer plus clairement que lui, sachant ce que je savois de ce qui se passoit de tous côtés à cet égard. J’étois très-bien averti que la cour lui donnoit à peu près la carte blanche ; et je n’ignorois pas que, bien qu’il la pût remplir presque à sa mode, il ne laissoit pas d’écouter de simples propositions qui étoient bien au dessous de celles qu’on lui offroit.

Madame de Chevreuse, qui n’étoit pas encore sortie de Paris en ce temps-là, lui dit, plutôt en riant que sérieusement, qu’il pouvoit faire la plus belle action du monde, s’il faisoit lever le siége d’Etampes : en quoi il satisferoit pleinement et Monsieur et les Espagnols ; et si au même moment il ramenoit ses troupes en Flandre : en quoi il plairoit au dernier point à la Reine, de qui il avoit fait en tout temps profession publique d’être serviteur particulier. Ce parti, qui tenoit comme des deux côtés, plut à son incertitude naturelle ; il le prit sans balancer, et madame de Chevreuse s’en fit honneur à la cour, qui de sa part ne fut pas fâchée de couvrir la nécessité où elle se trouva de lever le siége d’Etampes de quelques apparences de négociations, qu’elle grossit dans le monde de mille et mille particularités que les raisonnemens du vulgaire honorent toujours de mille et mille mystères. Il n’y eut rien au monde de plus simple que ce qui se fit en ces rencontres ; et quoique je ne fusse point du tout en