étoit nécessaire de me tuer ; et quelques-uns disant qu’il y avoit trop d’inconvéniens à violer en cette occasion la foi publique. M. le prince Thomas[1] fit dire à mon père, par le P. Senault[2] de l’Oratoire, le propre jour que je retournai à Paris, qu’il avoit été de ce dernier avis ; qu’il ne nommoit personne, mais qu’il y avoit au monde des gens bien scélérats. Madame la palatine ne me témoigna pas que l’on eût été jusque là ; mais elle me dit, dès le lendemain que je fus arrivé, qu’elle m’aimoit mieux à Paris qu’à Compiègne. La Reine me reçut pourtant fort bien : elle se fâcha devant moi contre l’exempt des gardes, qui ne m’avoit pas rencontré, et qui s’étoit égaré, disoit-elle, dans la forêt. Le Roi me donna le bonnet le matin du lendemain, et l’audience l’après-dînée. Je lui fis la harangue qui est imprimée[3].
La réponse du Roi fut honnête, mais générale ; et j’eus même beaucoup de peine à la tirer par écrit[4].
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Voilà ce qui parut à tout le monde de mon voyage de Compiegne : voici ce qui s’y passa dans le secret.
Je dis à la Reine, dans mon audience particulière qu’elle me donna dans un petit cabinet, que je ne venois pas seulement à Compiegne en qualité de député de l’Église de Paris, mais que j’en avois encore
- ↑ Thomas-François de Savoie, prince de Carignan, etc., mort en 1656. Il étoit fils de Charles-Emmanuel. (A. E.)
- ↑ Le père Senault : Jean-François. Il fut l’un des premiers prédicateurs qui donnèrent à l’éloquence sacrée la dignité qui lui convient. Ses talens et ses vertus le firent nommer général de l’Oratoire fonctions qu’il’exerça pendant dix ans. Il mourut en 1672.
- ↑ La harangue qui est imprimée : L’extrait de cette harangue se trouve dans la Notice.
- ↑ Il y a quelques lignes effacées dans cet endroit du manuscrit. (A. E.)