Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 46.djvu/185

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d’y faire beaucoup de réflexion, faute de ne pas savoir profiter de ses fautes. La fortune toute seule les tourna à son avantage et si Monsieur et M. le prince se fussent servis, comme ils eussent pu, du refus qu’elle fit de recevoir la députation de l’hôtel-de-ville, elle eût couru grand risque de n’en avoir de long-temps. Elle répondit à Pietre, procureur du Roi, qui étoit allé demander audience pour les échevins et quarteniers, qu’elle ne la leur pouvoit accorder tant qu’elle reconnoîtroit M. de Beaufort pour gouverneur, et M. de Broussel pour prévôt des marchands. Le président Viole me dit, aussitôt qu’il eut appris cette nouvelle : « Je n’approuvois pas cette députation, parce que je croyois qu’il pouvoit y avoir plus de mal que de bien pour Monsieur et pour le prince. Tout y est bon pour eux présentement, par l’imprudence de la cour. » L’abdication volontaire du bonhomme Broussel consacra, pour ainsi dire cette imprudence. Ce qui est vrai, c’est qu’il y avoit des tempéramens à prendre, même en conservant la dignité du Roi, qui n’eussent pas aigri les esprits au point que ce refus les aigrit. Si l’on en eût fait l’usage qu’on en pouvoit faire, les ministres s’en fussent repentis pour long-temps tant ils poussoient étourdiment cette affaire et toutes les autres.

Ce qui est admirable est que la cour se conduisoit comme je viens de vous l’expliquer, justement dans le moment que le parti de messieurs les princes se fortifioit même très-considérablement. M. de Lorraine, qui crut qu’il avoit satisfait, en sortant du royaume, au traité qu’il avoit fait avec M. de Turenne à Villeneuve-Saint-Georges, fit tirer deux coups de canon