Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 46.djvu/188

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soupçon pouvoit assez facilement tomber sur moi. Monsieur n’étoit pas, comme vous avez vu, dans les dispositions de se servir de ces conjonctures ; et M. le prince étoit si las de tout ce qui s’appeloit peuple, qu’il n’y faisoit pas seulement de réflexion. Croissy m’a dit depuis qu’il ne tint pas à lui de le réveiller à ce moment, et de lui faire connoître qu’il ne le falloit pas perdre. Je ne me suis jamais souvenu de lui en parler. Voici une autre faute qui n’est pas moindre à mon opinion que la première. M. de Lorraine, qui aimoit beaucoup la négociation, y entra d’abord qu’il fut arrivé. Il me dit, en présence de Madame, que la négociation le suivoit partout ; qu’il étoit sorti de Flandre las de travailler avec le comte de Fuensaldagne, et qu’il la retrouvoit à Paris malgré lui. « Car que faire autre chose ici, dit-il, où il n’y a pas jusqu’au baron Du Jour qui ne prétende faire son traité à part ? » Ce baron Du Jour étoit une manière d’homme assez extraordinaire de la cour de Monsieur ; et M. de Lorraine ne pouvoit pas mieux exprimer qu’il y avoit un grand cours de négociation, qu’en marquant qu’elle étoit venue jusqu’à ce baron Du Jour. Or ce qui, lui faisoit croire encore que cette négociation étoit montée jusqu’à Monsieur, c’est qu’il avoit remarqué que depuis quelque temps il ne l’avoit pas pressé de s’avancer, comme il avoit fait auparavant. Son observation étoit vraie et il est constant que Monsieur, qui vouloit la paix de bonne foi, craignoit, et avec raison, que M. le prince, se voyant renforcé d’un secours aussi considérable, n’y mît des obstacles invincibles.

Il fut très-aise par cette considération que M. de Lorraine fût dans la disposition de négocier aussi lui--