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avec lui ? Que sais-je si dans un instant il ne me livreroit pas à M. le prince, s’il lui prenoit fantaisie de revenir sur ses pas, et de se soulever ? » Je crois que vous êtes moins surprise de la conduite de Monsieur en voyant ces principes. On dit que l’on ne doit jamais combattre contre les principes ; ceux de la peur se doivent et se peuvent encore moins attaquer que tous les autres : ils sont inabordables.

Le 19, Monsieur dit au parlement qu’il avoit reçu une lettre du Roi qui lui mandoit qu’il viendroit le 21 à Paris, qui étoit le lundi : à quoi il ajouta qu’il étoit fort surpris de ce que leurs Majestés n’envoyoient pas au préalable une amnistie qui fût vérifiée dans le parlement de Paris. La consternation fut extrême. L’on opina, et l’on arrêta de supplier le Roi d’accorder cette grâce et au parlement et à ses peuples.

Cette lettre du Roi à Monsieur lui fut apportée le 18 au soir ; il m’envoya quérir aussitôt, et il me dit que la conduite de la cour étoit incompréhensible ; qu’elle jouoit à perdre l’État, et qu’il ne tenoit à rien qu’il ne fermât les portes au Roi. Je lui répondis que pour ce qui étoit de la conduite de la cour, je la concevois fort bien ; qu’elle n’hasardoit rien, connoissant comme elle faisoit ses bonnes et pacifiques intentions ; qu’il me paroissoit qu’elle agissoit au moins dans ses fins avec beaucoup plus de prudence qu’elle n’avoit traité le passé, et bien plus finement qu’elle n’avoit agi dans les commencemens ; que je ne voyois pas quelle difficulté elle pouvoit faire de revenir à Paris, après que Monsieur avoit promis, dès le 14 de ce mois, le rétablissement du prevôt des marchands et des échevins, ordonné et exécuté sans aucun concert avec lui. Mon-