Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 46.djvu/333

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voyoit ; mais comme il étoit fort bas à la cour et fort timide, il se redressoit en public. Ursin, qui étoit l’ame du monde la plus vile, me morguoit également partout. Bichi me saluoit toujours civilement ; et Grimaldi n’observoit l’ordre du Roi qu’en ce qu’il ne me visitoit pas : car il me parloit même dans la rencontre, et toujours fort honnêtement. Ce détail vous paroît sans doute une minutie ; mais ce qui fait que je ne l’omets pas, c’est qu’il me paroît être une véritable et bien naturelle image de la lâche politique des courtisans. Chacun d’eux la monte et la baisse à son cran, et leur inclination la règle sans comparaison davantage que leurs véritables intérêts.

Ils se conduisirent tous dans le conclave différemment sur mon sujet. J’observai qu’ils en turent tous également à la cour. J’ai appliqué depuis cet exemple à mille autres. Je vivois avec autant d’honnêteté à leur égard que s’ils eussent bien vécu avec moi. J’avois toujours la main an bonnet devant eux de cinquante pas, et je poussai ma civilité jusqu’à l’humilité. Je disois à qui le vouloit entendre que je leur rendois ces respects non pas seulement comme à mes confrères, mais encore comme à des serviteurs de mon Roi. Je parlois en Français, en chrétien, et en ecclésiastique. Ursin m’ayant un jour morgué si publiquement que tout le monde s’en scandalisa, je renouvelai mes honnêtetés pour lui à un point que tout le monde s’en édifia. Ce qui arriva le lendemain releva cette modestie, ou plutôt cette affectation de modestie. Le cardinal Jean-Charles de Médicis, qui étoit naturellement impétueux, s’éveilla contre moi sur ce que j’étois, ce disoit-il, trop uni avec l’escadron. Je lui