Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 46.djvu/359

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pape Alexandre l’eut appris, il en donna part au sacré collége en plein consistoire, par un discours très-étudié. Il n’oublia rien pour nous faire entendre qu’il avoit été l’unique instrument dont Dieu s’étoit servi pour cette conversion. Il n’y eut personne qui ne fût très-bien informé du contraire ; et jugez, s’il vous plaît, de l’effet qu’une vanité aussi mal entendue y put produire ! Il ne vous sera pas difficile de concevoir que cette manière de Sa Sainteté ne me devoit pas donner une grande idée de ce que je pouvois espérer de sa protection ; et je reconnus de plus, en peu de jours, que sa foiblesse pour les grandes choses augmentoit à mesure de son attachement aux petites.

On fait tous les ans un anniversaire pour l’ame de Henri-le-Grand dans l’église de Saint-Jean-de-Latran, où les ambassadeurs de France et les cardinaux de la faction ne manquent jamais d’assister. Le cardinal d’Est prit en gré de déclarer qu’il ne m’y souffriroit pas. Je le sus ; je demandai audience au Pape pour l’en avertir : il me la refusa, sous prétexte qu’il ne se portoit pas bien. Je lui fis demander ses ordres sur cela par monsignor Febei, qui n’en put rien tirer que des réponses équivoques. Comme je prévoyois que s’il arrivoit là quelque fracas entre M. le cardinal d’Est et moi, où il y eût le moins du monde de sang répandu, le Pape ne manqueroit pas de m’accabler, je n’oubliai rien de tout ce que je pus faire honnêtement pour m’attirer un commandement de ne me point trouver à la cérémonie. Comme je n’y pus pas réussir, et que je ne voulus pas d’ailleurs me dégrader moi-même du titre de cardinal français en m’excluant des fonctions qui étoient particulières à la nation, je me résolus de