Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 46.djvu/435

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Sinon enjoint à bourg à ville,
De lui courir sus comme au loup
À qui chacun donne son coup,
Taloche, on panne, gringuenaude,
Et de lui jeter de l’eau chaude
Indulgence à qui l’occiroit.
Cependant que l’on armeroit
Pour la sûreté des entrées
Et pour l’escorte des denrées.
Ce même jour vinrent ici
Messieurs les bouchers de Poissy,
Disant que par une ordonnance
Le Roi leur a donné vacance,
Et défendu de trafiquer,
Tant qu’il cessât de nous bloquer.
    Le samedi neuf, fut choisie
De la plus leste bourgeoisie
Que l’on pensoit faire sortir :
Mais elle n’y put consentir.
Néanmoins c’étoit la plus leste :
Jugez donc par elle du reste !
Et dès ce jour l’on connut bien
Que la meilleure n’en vaut rien.
Or, ce jour de quelque village
Il vint du pain et du fromage.
Mais que nous causa de tourmens,
Et plus qu’aux plus parfaits amans
L’éloignement d’une maîtresse,
L’absence des pains de Gonesse !
Que quinze cents colin-tampons
Assurèrent être fort bons,
Comme des gardes quelque bande
La pinte de Saint-Denis grande ;
Gardes qui parurent très-fiers
Aux pauvres choux d’Aubervilliers.
    Ce même jour, fut rétablie
La taxe du temps de Corbie,
Avec ordre à chaque habitant
De payer une fois autant ;
Que, pour jouir des bénéfices
Attachés aux premiers offices,
Les conseillers mal agréés,
En six cent trente-cinq créés,
Payeront trois cent mille livres
Dont ils feront charger les livres.
    Ce jour il n’entra pas un bœuf ;
Mais les vaillans princes d’Elbœuf,
Et notamment le duc leur père,
Fort touché de notre misère,
Avec un joli compliment
Se vint offrir au parlement
Pour être le chef de l’armée ;
Et sa valeur fut estimée.
Cette nuit, on fut averti
Que le grand prince de Conti,
Avec le duc de Longueville,
Etoient reçus dans notre ville.
    Monsieur d’Elbœuf fit le serment
De général du parlement,
Dimanche du mois le dixième.
Monsieur de Conti, ce jour même
Vint assurer toute la cour
De son zèle et de son amour ;
Et messieurs firent mine bonne
À cet appui de la couronne
Qui sembloit courbé sous le faix.
On fit ensuite deux arrêts :
Le premier, que Son Eminence
Obéiroit sans résistance
À l’arrêt que rendit la cour
Contre elle le huitième jour.
Enjoint qu’on prenne prisonnière
Toute la nation guerrière,
Autant que nous en trouverons
À dix postes aux environs.
Ordre aux villes, bourgs et villages,
D’en faire de cruels carnages ;
Défense de lui rien fournir,
Que de bons coups à l’avenir.
Qu’en toutes les places frontières
Les garnisons seroient entières ;
Et de ceux qui contreviendroient,