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Tellement que le lendemain
Harfleur nous fit ouvrir la porte.
La garnison, n’étant pas forte
Se rendit à discrétion.
Après cette reddition,
Nos gens furent faire godaille
Au château de pierre de taille
Du sieur de Fontaine-Martel :
Château très-fort-, mais non pas tel
Que les nôtres ne le forcèrent,
Et deux canons n’en rapportèrent,
Sans les meubles et le bétail
Dont je ne fais point le détail.
    Le jeudi[1] jour que Notre-Dame
Sut que de fille elle étoit femme
Par une annonciation,
Tout étoit en dévotion ;
Quand lettre de cachet venue
Fit que séance fut tenue,
Où, quand nos chefs furent venus,
Tous les premiers propos tenus
Furent de savoir si la trêve,
Ennuyeuse aux gens de la Grève,
Et qui finissoit ce jour-la,
Passeroit encore au delà :
Trêve qui reçut anicroche
Jusques au lundi le plus proche,
Et compris inclusivement
Par un arrêt du parlement.
    Ce jour, à La Ferté-sur-Jouarre,
Un mazarin qui disoit : Garre,
Qu’on fasse place à mon cheval !
Je viens’pour le parti royal
Loger ici des gens de guerre ;
Fut accueilli à coups de pierre,
Et de quelque coup de fusil.
Je pense que d’un grain de mil
On eût lors bouché son derrière.
Heureux de retourner arrière,
Maudissant, tout cicatrisé,
Le manant mal civilisé
Qui depuis garda ses murailles,
Crainte du droit de représailles.
    Samedi, du mois le vingt-sept,
Votre frère, encor tout mal fait
Du reste de sa maladie,
Fit déclaration hardie
Que celles que jusqu’à ce jour
Il avoit faites la cour
De ne faire aucune demande
Pour lui ni pour ceux de sa bande,
Le cardinal étant sorti :
Que, foi de prince de Conti,
Ces déclarations signées,
Qu’on avoit jusqu’ici bernées,
Recevroient applaudissement,
Pourvu qu’il plût au parlement
Rendre arrêt que Son Eminence
Eût à dénicher de la France,
Parce qu’ils ne pouvoient jamais
Autrement conclure la paix :
Que le feu partout s’alloit prendre,
S’il n’étoit couvert de sa cendre.
Qu’il prioit la cour d’y rêver,
Avant même que se lever.
Sur quoi la cour, à sa prière,
Rêva tant sur cette matière,
Qu’après sori rêve elle a trouvé
Qu’il avoit le premier rêvé.
Cependant, pour faire grimace,
Et pour ne rompre pas en face
De ce prince qu’elle honoroit,
La cour dit que l’on enverroit
Insister sur cette retraite,
Qui ne s’est pas encore faite.
Ce joùr, nous sûmes que Jarzé,
Du parti contraire engagé,
Partoit de Saint-Germain-en-Laye
Pour s’opposer à La Boulaye[2],
Qui faisoit merveille en Anjou

  1. 25 mars.
  2. Ce fut le 11 décembre qu’un dit que M. de La Boulaye cria aux armes !