Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 46.djvu/62

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de la bienséance, et encore plus par celle du peu de confiance qu’il avoit à sa conduite. Je me souviens qu’il me dit, le jour qu’elle prit congé de lui : « Cette chevalerie seroit bien ridicule si le bon sens de mesdames de Fiesque et de Frontenac ne la soutenoit. » Ces deux dames allèrent effectivement avec elle, aussi bien que M. de Rohan et messieurs de Croissy et de Bermont, conseillers du parlement. Patru disoit un peu trop librement que comme les murailles de Jéricho étoient tombées au son des trompettes, celles d’Orléans s’ouvriroient au son des violons. M. de Rohan passoit pour les animer un peu trop violemment. Enfin tout ce ridicule réussit par la vigueur de Mademoiselle, qui fut à la vérité très-grande : car quoique le Roi fût très-proche avec des troupes et que M. Molé garde des sceaux et premier président, fût à la porte, qui demandoit à entrer de sa part, elle passa la rivière dans un petit bateau ; elle obligea les bateliers, qui sont toujours en grand nombre sur le port, de démurer une petite poterne[1] qui étoit demeurée fermée depuis très-long-temps

  1. On fit la chanson suivante sur l’entrée de Mademoiselle dans Orléans
    Or, écoutez, peuples de France,
    Comme en la ville d’Orléans
    Mademoiselle, en assurance,
    A dit « Je suis maître céans. »
    On lui voulut fermer la porte ;
    Mais elle passa par un trou,
    S’écriant souvent de la sorte.
    « Il ne m’importe pas par où. »
    Deux jeunes et belles comtesses,
    Ses deux maréchales de camp,