Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 46.djvu/84

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si la cour ne se fût point pressée et qu’elle fût demeurée dans l’inaction, à cet instant tous les corps de la ville, qui dans la vérité commençoient à se lasser de la guerre civile, auroient été fatigués dès le suivant d’un spectacle qui les engagoient même ouvertement. Cette conduite eût été sage : la cour prit la contraire ; elle ne manqua pas aussi de faire un contraire effet : car, en désespérant le public, elle l’accoutuma en un quart-d’heure à M. le prince. Ce ne fut plus celui qui venoit de défaire les troupes du Roi : ce fut celui qui venoit à Paris pour s’opposer au retour du cardinal. Ces espèces se confondirent même dans l’imagination de ceux qui eussent juré qu’elles ne s’y confondoient pas. Elles ne se démêlent, dans les temps où tous les esprits sont prévenus, que dans les spéculations de philosophes qui sont peu en nombre, et qui de plus y sont toujours comptés pour rien, parce qu’ils ne mettent jamais en main la hallebarde. Tous ceux qui crient dans les rues, tous ceux qui haranguent dans les compagnies, se saisissent de ces idées. Voilà justement ce qui arriva par l’imprudence du Mazarin ; et je me souviens que Bachaumont, que vous connoissez, me disoit, le propre jour que les gens du Roi présentèrent au. parlement la dernière lettre de cachet dont je vous ai parlé, que le cardinal avoit trouvé le secret de faire Boislève frondeur. C’étoit tout dire : car ce Boislève étoit le plus décrié de tous les mazarins.

Vous croyez sans doute que Monsieur et M. le prince ne manquèrent, pas cette occasion de profiter de l’imprudence de la cour. Nullement. Ils n’en manquèrent aucune de corrompre, pour ainsi parler, celle-là ; et