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DE CONRART. [1652]

ciliable, jusque là qu’un prêtre de l’église de Saint-Jean en Grève, dont le curé étoit enveloppé dans le danger et y pensa périr, comme j’ai déjà dit, eut bien l’effronterie et l’inhumanité de dire au milieu du marché du cimetière Saint-Jean, à mademoiselle de Scuderi, de qui je l’ai appris, que c’étoit dommage que tous les mazarins qui étoient dans l’hôtel-de-ville n’y avoient été brûlés[1].

Plusieurs des parens et des amis de ceux qui se trouvoient exposés dans ce péril voulurent aussi faire armer les bourgeois de leur quartier pour les aller secourir ; mais la plupart refusèrent de prendre les armes, et ceux qui les prirent ne purent passer aux chaînes, ceux qui les gardoient disant que c’étoient des mazarins, et qu’il les falloit laisser périr : même lorsque l’on sut que la plupart s’étoient sauvés, et que les autres s’étoient défendus autant qu’ils avoient pu, en sorte que l’hôtel-de-ville n’avoit point été forcé, on pressa tant M. d’Orléans d’y envoyer, pour faire paroître au moins qu’il n’avoit aucune part à cette malheureuse action, qu’il consentit enfin que quelques uns de ses gardes y allassent ; mais on leur refusa le passage sur le pont Notre-Dame, disant qu’il falloit laisser exterminer tous ces mazarins-là. Mademoiselle même eut de la peine à aborder la Grève, quoiqu’elle n’y allât que fort tard ; car quand on la prioit d’aller

  1. Michel de Marolles dit que le but de cette sédition étoit de brûler les principaux habitans de Paris. Il fit à cet événement l’application d’une devise qu’il avoit composée sur les heures du cadran de l’hôtel-de-ville :
    Si nous allons mourir, nous espérons revivre.

    (Mémoires de Marolles, tome 2, pages 111 et 112, édit. de 1755.)