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[1652] MÉMOIRES

Après, il leur représentoit que M. de Candale reprenoit toutes leurs villes liguées ; que tous leurs postes étoient occupés par les troupes du Roi ; qu’ils n’avoient plus presque dehors que leurs murailles ;

    la rébellion continue ses violences sur les autres fidelles subjects de Sa Majesté, entre lesquels le curé de Saint-Pierre ayant esté cherché par des soldats du prince de Conty, s’est cassé un bras et une jambe lorsqu’il pensoit se sauver par une fenestre ; et le sieur Ithier, cousin de ce généreux père cordelier, âgé de soixante-cinq ans, a esté même appliqué à la question, laquelle il a néanmoins soufferte avec un courage merveilleux, sans donner aucune satisfaction à ses ennemis. Mais ce que chacun a trouvé encore beaucoup plus estrange, tous les religieux de cette maison, peu de temps avant que leur gardien sortist de l’hôtel-de-ville, s’y estant rendus en procession pour le demander, sans aucun respect du saint-sacrement qu’ils portoient, ils furent chassés par la garde jusques dans leur couvent, où le prince de Conty s’estant ensuite rendu, et les ayant trouvés en prières, il fit serrer dans le tabernacle, par un de ses aumôniers, le saint-sacrement que ces religieux avoient exposé depuis la détention de leur gardien ; et après qu’il les eut fait tous sortir, à la réserve de quelques malades, il les mena luy-mesme jusques au port de la Bastide, où, il leur fit passer la rivière, avec défense de retourner en ceste ville sur peine de la vie. » Il est question dans ce qui précède du curé de Saint-Pierre. Il ne sera pas inutile de placer ici un passage de la même gazette, qui fait connoître tout à la fois la belle conduite de ce vertueux prêtre, et l’excès des malheurs dans lesquels étoit plongée la ville de Bordeaux. Voici ce qu’on lit sous la date du 30 janvier 1653, page 137 : « L’ouverture des prières de quarante heures ayant été faite il y a quinze jours dans l’église Saint-Pierre de cette ville, le curé, dont la vie et la probité sont exemplaires, y fit une docte prédication, en laquelle il exhorta ses paroissiens à secouer le joug de l’autorité illégitime des ormistes et de tous les autres qui s’opposent à la paix, laquelle ne se peut trouver que dans la dépendance des subjects avec leur souverain : ce qui fut très-bien reçu de ses auditeurs. Mais le prince de Conty n’en fut pas plus tôt adverty, qu’il envoya chercher ce curé, et lui reprocha d’avoir presché contre son party. À quoy il répliqua qu’il n’estoit partisan que de l’Évangile, et que ses paroissiens attesteroient qu’il avait parlé comme devoit faire un bon pasteur. Néanmoins le sieur Brignon, l’un de nos jurats, alla le 23 de ce mois sur les sept heures du soir en sa maison ; et luy ayant commandé