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Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 63.djvu/190

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DE l’ABBÉ DE CHOISY.

fort afin que je me puisse sauver d’ici comme il fit il y a deux ans. »

Les choses changèrent de face encore plus d’une fois. Le coadjuteur étant devenu cardinal de Retz, augmenta de pouvoir et d’insolence. J’en rapporterai seulement un petit fait. Le Roi étoit rentré dans Paris aux acclamations du peuple, qui se lassoit de la guerre. Tout paroissoit tranquille et soumis ; M. le prince avoit pris la campagne ; et Monsieur, cantonné dans son palais du Luxembourg, étoit résolu de se retirer à Blois, lorsque le cardinal de Retz le vint trouver à six heures du soir, et lui dit qu’au lieu de fuir devant le cardinal Mazarin, il pouvoit encore être le maître s’il vouloit ; qu’il n’avoit qu’à donner l’ordre publiquement à ses gendarmes et à ses chevau-légers de se trouver le lendemain à sept heures du matin à la porte du Luxembourg pour aller à Blois ; et qu’au lieu d’en prendre le chemin, il n’avoit qu’à venir entendre la messe à Saint-Eustache ; qu’il lui répondoit qu’en un quart-d’heure toute la ville prendroit les armes, ferait des barricades et assiégeroit la cour dans le Louvre. Monsieur, suivant son naturel timide et inquiet, étoit fort incertain de son parti ; mais Madame, plus hardie, le détermina. Il promit d’aller le lendemain matin à la messe à Saint-Eustache, et de faire encore ce coup de vigueur. Aussitôt le cardinal de Retz partit de la main, et courut toute la nuit chez ses amis disposer toutes choses pour commencer les barricades dans les halles, dès que Monsieur paroîtroit à Saint-Eustache. Les harengères donnèrent parole de faire beau bruit : mais à cinq heures du matin on lui vint dire que Monsieur étoit parti pour Blois ; et