Page:Petrarque - Les Rimes de.djvu/209

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SONNET XXVIII.

Il se félicite de mourir malheureux par elle.

D’ordinaire je m’accuse ; et maintenant je m’excuse, ou plutôt je me glorifie, m’en tenant pour beaucoup plus estimable, de l’honnête prison où j’ai été, de la blessure, à la fois douce et amère, que j’ai gardée cachée autrefois pendant de nombreuses années.

Envieuses Parques, comme vous avez promptement brisé le fuseau qui dévidait un fil doux et brillant à mon lien, ainsi que cette flèche dorée et rare qui me rendit la mort plus plaisante qu’elle n’est d’habitude !

Car jamais, au temps de Laure, il n’y eut d’âme si avide d’allégresse, de liberté et de vie, qui ne changeât sa nature et ses habitudes,

Aimant mieux gémir sans cesse pour elle, que chanter pour toute autre, et satisfaite de mourir d’une telle blessure, et de vivre en un tel lien.


SONNET XXIX.

Il rendra immortelle cette Dame chez laquelle l’honnêteté et la beauté cohabitaient en paix.

Deux grandes ennemies, la beauté et l’honnêteté, étaient réunies ensemble dans une paix telle que jamais son âme sainte ne ressentit de rébellion depuis qu’elles étaient venues habiter avec elle.

Et maintenant la mort les a dispersées et disjointes ; l’une est dans le ciel qui s’en glorifie et s’en vante ; l’autre est sous la terre qui voile les beaux yeux d’où sortirent jadis tant d’amoureux traits.

La suave attitude, et le parler sage et humble qui