Page:Petrarque - Les Rimes de.djvu/210

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provenaient de haut lieu, et le doux regard qui me perçait le cœur — et qui l’émeut encore —

Sont disparus ; et si je tarde à les suivre, peut-être arrivera-t-il que je consacrerai avec ma plume fatiguée ce beau et noble nom.


SONNET XXX.

En se rappelant sa vie passée, il frémit et confiait la propre misère.

Quand je me tourne en arrière pour regarder les années qui, en fuyant, ont dispersé mes pensers, éteint le feu où je brûlai tout en gelant, mis un terme à mon repos plein d’angoisses,

Rompu la foi des amoureux mensonges, fait deux parts seulement de mon unique bien, dont l’une est dans le ciel et l’autre dans la terre, et perdu tout le fruit de mes peines ;

Je tressaille, et je me trouve si nu que je porte envie au sort le plus misérable, tant j’ai compassion et peur de moi-même.

Ô mon étoile, ô fortune, ô destin, ô mort, ô jour à jamais doux et cruel pour moi, en quel état d’abaissement vous m’avez mis !


SONNET XXXI.

La perte de Laure est très grande, car ses beautés étaient grandes et rares.

Où est le front qui, d’un léger signe, tournait mon cœur ici et là ? Où est le beau sourcil, et l’une et l’autre étoile qui projetèrent la lumière sur le cours de ma vie ?

Où est le mérite, le savoir et le sens, l’accorte, l’honnête, l’humble, la douce parole ? où sont les