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Page:Peyrebrune - Le Roman d un bas bleu 1892.djvu/259

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des aliments ; mais il devenait de plus en plus incohérent. Et c’est à peine si on lui arrachait, aujourd’hui, une phrase de quelques mots ayant une suite.

— Voyons, docteur, et cette histoire, hein ! votre mariage !… contez-nous donc cela !…

L’homme pouffa, fit claquer ses doigts et ricana :

— Oui, ah ! elle était bien bonne !… Mais il cherchait, bégayait, ne se souvenait plus.

Alors, l’interne le poussa :

— Vous savez bien, votre femme : Ave MariaAve Maria

— Ah ! oui, tout le temps…

Il se tapa sur les cuisses, se tordant pour rire, la bouche baveuse.

— Pas une femme ça, un chapelet !

L’interne expliqua à demi-voix lui tournant le dos :

— Il prétend qu’il s’était trompé le jour de ses noces, qu’il avait ramené de l’église une sainte en pierre et que sa femme était demeurée à sa place dans la niche. On l’a trouvé un jour, dans une chapelle, en train de déshonorer une statue.

L’homme esquissait des gestes… on l’emmena.

— Bonjour, bonjour, docteur, lui disaient ces messieurs en riant.

José se pencha vers l’un d’eux qu’il connaissait.

— Pourquoi l’appelle-t-on docteur ?

— Oh ! pour flatter sa manie.

— Il se croit donc médecin ?

— Il l’était, mais simple officier de santé, en province.

— Il se nomme ?

— Numéro 174, répondit le carabin en riant.

— Oui, mais… je vous en prie !…

— Vous y tenez ?