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Page:Peyrebrune - Le Roman d un bas bleu 1892.djvu/289

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chère amie ; mais vraiment, je ne puis me dispenser d’aller où je vais.

— Oh ! je le crois. C’est très dur tout de même. Jamais je ne me suis sentie plus lasse de cette éternelle solitude…

— N’avez-vous pas travaillé à la créer autour de vous ?

— Peut-être.

— Alors ?

— Je n’accuse personne. Je m’ennuie, voilà tout. Quand reviendrez-vous ?

— Mais… un de ces prochains jours. Voulez-vous me dire lequel ?

Sylvère, avec un geste nerveux :

— Le plus tôt possible.

— Eh bien, c’est cela, le plus tôt possible.

— Comment, vous partez ?

— Il est près de sept heures, et, là où je vais, on se met à table à la demie précise.

— Et vous vous résignez à cela, vous qui n’avez jamais faim avant neuf heures ?

— Que voulez-vous ? quand on accepte une situation, il faut en subir toutes les conséquences.

Il s’était levé et s’éloignait à reculons. Elle le suivait d’un pas saccadé, presque rageur, travaillée d’un agacement douloureux qui la pâlissait jusqu’aux lèvres. Elle voulait le retenir encore et cherchait des mots qui ne lui venaient pas. D’ailleurs, Paul ne paraissait pas extrêmement pressé de partir ; il la regardait et une tristesse, peu à peu, détendait son visage, y remplaçait la placidité souriante jusqu’alors maintenue.

Ne trouvant rien, elle balbutia, inconsciente :

— Alors, comme cela, vous partez ?