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Page:Peyrebrune - Le Roman d un bas bleu 1892.djvu/95

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couaient le cerveau d’une trépidation douloureuse, cette fois, c’est bien vrai ! Il m’aime ! Il m’aime !… Et il faut l’éloigner de moi, tout de suite, loyalement.

Qu’ai-je donc à souffrir ainsi ? Suis-je absurde ! Vraiment l’on dirait que cela se gagne, ces fièvres-là, dans ce monde effréné de vices qui vous empeste l’âme — encore qu’on s’en écarte — comme les vapeurs mortelles d’un marais. Est-ce que je m’en vais les subir, moi aussi, ces coups de passion qui vous détraquent et vous rendent infidèles aux affections premières, aux engagements sacrés, aux fois jurées… Mais, plutôt, je m’écraserai le cœur de mes deux mains.

A quoi sert-il d’étudier, d’observer les autres, si cette étude et cette observation ne doivent pas vous préserver vous-même ? Certainement j’ai eu tort, je n’aurais pas dû recevoir José, puisque sa vue m’était si agréable et que ses entretiens me semblaient si doux. C’est ainsi qu’on laisse prendre en soi ces empreintes d’images et de souvenirs qui ensuite vous obsèdent, jusqu’à ce qu’elles soient devenues ineffaçables, et triomphent de vos plus vertueux vouloirs.

Ce qui est dangereux pour la vertu d’une femme, ce n’est pas d’être chaque jour en relation avec un grand nombre d’hommes, c’est de n’en recevoir, de temps en temps, qu’un seul.

Je m’habituais à José ; c’est évident ; tout en moi prenait cette accoutumance ; mes pensées, mes yeux, mes mains, qui ne fuyaient plus ses baisers… Il était temps !

Elle écrivit :

— « Mon cher ami, si j’étais une coquette, ou si j’avais moins d’amitié pour vous, je me laisserais aller