Page:Peytraud - L'esclavage aux Antilles françaises avant 1789, 1897.djvu/138

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qu’il n’avait pas pu se procurer des aliments du pays pour nourrir sa cargaison ; dans le troisième, sur 290, 1 seul ; enfin, dans un de ses derniers, sur 600, 9. D’après ces chiffres, la moyenne n’est que de 4 %. Le capitaine Macintosh n’avoue qu’une perte de 7 au plus sur 400 et parle de plusieurs voyages qu’il a faits sans en perdre un seul. Jean Fontaine dit 1 sur 300. Mais nous sommes loin de compte d’après d’autres documents également dignes de foi. Ainsi, dans un Mémoire du 15 mai 1714[1], adressé au Ministre pour lui faire connaître la nécessité d’accorder aux négociants autant de permissions qu’ils en demanderont pour le commerce de Guinée, nous lisons : « Un navire qui en charge 300 en perd au moins 1/6 dans la traversée. » Consultons, d’autre part, la Réponse faite à Messieurs les philanthropes anglais[2], elle est d’un anonyme, qu’on ne saurait accuser d’exagérer la vérité, puisque, au contraire, il s’efforce de réfuter les accusations portées contre ceux qui font la traite avec cruauté. Il revient à plusieurs reprises sur cette question de la mortalité. Il est vrai, dit-il d’abord au § 4, que la mortalité des captifs va quelquefois à 20 % ; mais ce n’est que dans des temps de maladies épidémiques en Afrique, et alors ils meurent chez eux comme à bord des navires. On peut seulement se demander dans ce cas pourquoi les traitants avaient l’imprudence de les embarquer. Rapportons textuellement une partie du § 11 : « L’auteur anglais (également anonyme) cite des exemples de 50 et 60 % de perte. Cela est possible et arrive souvent dans les cargaisons de Bénin et de Kalbarre. Les peuples de ces parties sont plus mélancoliques que ceux des autres parties de l’Afrique. Quand ils sont à bord de nos navires, ils cherchent à se détruire, imaginant qu’après leur mort ils se retrouveront dans leur pays. » Il n’y avait pas moyen de les égayer. Il arrivait

  1. Arch Col., C6, 4.
  2. Arch. Col., F, 61. La pièce est sans date, mais elle doit être placée entre 1780 et 1790.