Page:Peytraud - L'esclavage aux Antilles françaises avant 1789, 1897.djvu/286

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ticle 48 du Code Noir. Or la règle établie par cet article, dit-il, « a toujours été observée dans toutes les colonies, et il n’est pas permis aux juges de s’en écarter. Les gouverneurs généraux et intendants ne sont même pas en droit d’y déroger. » L’exception autorisée par l’arrêt du 6 août 1740 relativement aux receveurs reliquataires est la troisième et dernière qui ait été faite. Il lui demande cependant un Mémoire sur la question.

En 1758[1], à la Guadeloupe, une veuve, ayant renoncé à la communauté de son mari, réclame contre les héritiers bénéficiaires de la succession, en vertu de la clause de reprise portée par son contrat de mariage, outre des immeubles qui n’avaient point été aliénés, un certain nombre d’esclaves provenant d’avancement d’hoirie ou de successions et qui se trouvaient en nature dans la masse des biens de la communauté. L’arrêt du Conseil supérieur décide qu’elle reprendra ses esclaves, sans faire raison à la succession de son mari de la différence de la nouvelle estimation à l’ancienne. C’est là, on le voit, une application de l’article 45 du Code Noir.

Les administrateurs continuent à réclamer pour que la législation soit modifiée. Ainsi l’intendant de la Martinique, prononçant un discours devant le Conseil supérieur, le 6 septembre 1763, s’exprime en ces termes : « Les augmentations prodigieuses qui, dans le cours des quatre dernières années de la guerre, sont survenues à la Guadeloupe dans le nombre de ses esclaves, dans celui de ses manufactures, dans ses plantations et ses productions en tout genre, rapprochées du petit nombre des nègres que la Martinique a pu se procurer pendant seize mois, dans des circonstances qui semblaient faciliter et provoquer les achats, achèvent de mettre dans la dernière évidence les inconvénients d’une loi qui, par elle-même, est exclusive de toute confiance, de tout crédit[2]. »

  1. Arch. Col., Colonies en général, XIII, F, 90. Extrait d’un rapport au Conseil supérieur de la Guadeloupe.
  2. Arch. Col., F, 145. Extrait des registres du Conseil supérieur de la Martinique.