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Page:Pfeiffer - Voyage d une femme autour du monde, trad. de Suckau, Hachette, 1859.djvu/65

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Enfin, si l’on considère les productions du Brésil, il lui manque plusieurs articles importants. Il a bien le sucre et le café, mais il n’a ni blé, ni pommes de terre, ni aucun de nos excellents fruits. Le manioc, que l’on broie dans des mortiers, tient la place du pain, mais il n’est ni aussi substantiel ni aussi nourrissant. Diverses plantes à tubercules assez doux au goût ne sont pas comparables à nos pommes de terre, et parmi les fruits il n’y a de bons que les oranges, les bananes et les mangoustes. L’ananas si vanté n’a ni grand arôme ni grand goût : j’en ai mangé d’infiniment plus savoureux qui étaient venus dans des serres d’Europe. Les autres fruits ne sont pas dignes d’être nommés. Enfin deux aliments essentiels, le lait et la viande, laissent beaucoup à désirer : le premier est très-aqueux, le second très-sec.

En somme, soit que l’on s’en tienne à l’ensemble, soit que l’on entre dans le détail et que l’on compare les avantages et les inconvénients, la balance penchera d’abord vers le Brésil, mais ensuite elle inclinera infailliblement vers l’Europe. Pour le voyageur, le Brésil est peut-être le pays le plus intéressant du monde. Mais comme séjour ordinaire je n’hésite pas à dire que je choisirais assurément l’Europe.

Les mœurs et les coutumes du Brésil ne me sont pas assez familières pour me permettre de porter un jugement précis, et je suis obligée de me borner à quelques renseignements. En somme, elles semblent se distinguer peu de celles des Européens, car les possesseurs actuels du pays viennent du Portugal, et l’on pourrait nommer avec raison les Brésiliens, des Européens transportés en Amérique. Que dans ce transport quelques habitudes se soient perdues et qu’il en soit né de nouvelles, cela est bien naturel. La qualité distinctive des Européens devenus Américains est une soif de l’or qui tourne à la frénésie, et qui de l’Européen pusillanime fait souvent un héros : car il faut véri-