Page:Philippe - Les poetes de la Savoie.djvu/16

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
10
INTRODUCTION.

l’honnête idée littéraire. On avait fait appel au ventre, et le ventre avait répondu, ainsi que le disait énergiquement un homme politique. Or, lorsque le ventre parle, le cœur se tait.

Dès lors, si le mal a changé de nature, il n’en existe pas moins. Où ont tendu jusqu’à ce jour les efforts des masses, si ce n’est à la prompte satisfaction des appétits matériels ? La bouche du fusil ou du canon n’aboie plus la faim sur la place publique, mais la soif de l’or, de l’or qui conduit à toutes les jouissances physiques, n’a-t-elle pas amplement remplacé le cri du ventre ? L’idée est à la spéculation ; l’argent seul domine et parle en maître ; la base de la morale, aux yeux de la masse, est la pièce de monnaie. C’est à qui arrivera le plus tôt au but tant désiré : à la richesse ; les fortunes se font et se défont en un jour ; la Bourse est devenue le temple favori, et la corbeille des agents de change est le sanctuaire où trône la divinité moderne. Il nous en coûte de l’avouer, mais la folie du jour a gagné jusqu’à certains littérateurs qui, par profession, auraient dû être les der-