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Page:Philippe - Marie Donadieu, 1904.djvu/270

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belle ? Oui, je veux que tu sois belle. C’est moi qui t’ai faite, c’est eux qui m’ont chassée de toi. Lui, il me battait. Ses femmes l’accompagnaient jusque sur mon palier. Je les entendais s’embrasser à travers la porte. Je ne sais pas si c’est vrai : C’est vrai, aujourd’hui. Ah ! j’ai souffert. Ton grand-père est dur. Dis-moi que ton grand-père est dur.

— Oui, maman.

— Ta voix est douce, ma fille. Il faut qu’elle soit plus douce pour moi que pour les autres. Parle-moi encore. As-tu eu des amants ?

— Oui, maman.

— Tu m’as écrit : J’ai de la peine. J’en étais sûre. Je me disais : Voici qu’elle a vingt ans, et elle aura de la peine. Comment la préserveront-ils, là-bas ? Ah ! tu ne sais pas encore ce qu’est une mère. Mais je suis jalouse. J’étais sûre que tu aurais des amants loin de moi. Ah ! ils ont voulu t’élever. Ça ne leur a pas porté bonheur. Tu as eu des amants sur les yeux, sur la bouche, sur la gorge. Moi, je t’embrasserai partout. Et maintenant, dis : Maman ! Ne dis rien que ça. Allons, parle :

— Ma-man…