Page:Philippe - Marie Donadieu, 1904.djvu/314

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sais, tu m’en veux parce que je suis partie avec lui. Mais, mon petit Jean, le bon matelot est celui qui a déjà fait naufrage. Autrefois, il y avait des risques, puisque je ne connaissais pas mes faiblesses. Maintenant, je me surveillerai, j’examinerai mon cœur comme on examine un toit, de crainte qu’il ne tombe. Moi aussi, je suis un savant ingénieur ; j’ai la pratique des fissures. Et puis, mon grand-père. Lorsque je suis partie l’an dernier, il pleurait parce qu’il ne voulait pas que je m’en aille. Je l’ai revu, il sait tout, il a pleuré parce qu’il ne veut pas que je revienne à lui. Je n’ai rien dit, j’étais heureuse, je pensais : J’ai passé longtemps à faire de la peine aux autres ; tout le mal que je porte doit être épuisé, il ne me reste plus que du bonheur, je vais aller l’offrir à Jean. Et puis, maintenant, nous serons deux à t’aimer. Il y a maman. Écoute, Jean, j’ai une maman à mon tour : je l’avais bien gagnée. Je te raconterai tout cela : on m’avait fait croire qu’elle était morte. Elle m’a dit : « Mets tes deux mains sur ma hanche, il me semblera que tu es encore en moi. » C’est elle qui m’a donné cette robe.