Page:Philippe - Marie Donadieu, 1904.djvu/99

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Et embrassa Jean, au hasard, dans un œil.

Alors Jean partit à son tour. Il eût voulu soulever, du fond de son âme, les parties romanesques et cachées pour qu’elle les baisât aussi.

— Moi, je suis venu à Paris avec mon amoureuse. Elle avait soixante-huit ans. C’était un grand vieux. Il n’était plus bon à rien. Je l’avais mis chez moi, dans ma chambre, et puis quand je rentrais le soir, il avait fait la cuisine. Il portait un grand chapeau, une grande barbe, de grosses lunettes noires. C’était l’hiver. Je lui disais : « Fais donc tailler ta barbe. » Il répondait : « Tu m’embêtes. Ça me couvre le cou, ça m’économise un foulard. » Il ne me gênait pas du tout. Et puis, un jour, ma petite Marie, il est parti. Il disait : « Y a pas assez de place dans la chambre, y a plus de pain chez nous. » Moi, j’aurais voulu le garder toute ma vie. Une fois, je me suis entravé dans son pied. Il avait des gros sabots. Je suis tombé et j’ai cassé une assiette, je la tenais à la main. Il m’a dit : « Je t’embarrasse, pauvre ami, je t’embarrasse. » Il s’est jeté dans la Seine. Il pensait : « Au moins je n’embarrasserai que les poissons. »