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prompt effet des boissons.

Les boissons s’absorbent dans l’économie animale avec une extrême facilité ; leur effet est prompt, et le soulagement qu’on en reçoit en quelque sorte instantané. Servez à un homme fatigué les aliments les plus substantiels, il mangera avec peine et n’en éprouvera d’abord que peu de bien. Donnez-lui un verre de vin ou d’eau-de-vie, à l’instant même il se trouve mieux et vous le voyez renaître.

Je puis appuyer cette théorie sur un fait assez remarquable que je tiens de mon neveu, le colonel Guigard, peu conteur de son naturel, mais sur la véracité duquel on peut compter.

Il était à la tête d’un détachement qui revenait du siége de Jaffa, et n’était éloigné que de quelques centaines de toises du lieu où l’on devait s’arrêter et rencontrer de l’eau, quand on commença à trouver sur la route les corps de quelques soldats qui devaient le précéder d’un jour de marche, et qui étaient morts de chaleur.

Parmi les victimes de ce climat brûlant se trouvait un carabinier, qui était de la connaissance de plusieurs personnes du détachement.

Il devait être mort depuis plus de vingt-quatre heures, et le soleil, qui l’avait frappé toute la journée, lui avait rendu le visage noir comme un corbeau.

Quelques camarades s’en approchèrent, soit pour le voir une dernière fois, soit pour en hériter, s’il y avait de quoi, et ils s’étonnèrent en voyant que ses membres étaient encore flexibles et qu’il y avait même encore un peu de chaleur autour de la région du cœur.

« Donnez-lui une goutte de sacré-chien, dit le lustig