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MÉDITATION XI

DE LA GOURMANDISE


55. — J’ai parcouru les dictionnaires au mot Gourmandise, et je n’ai point été satisfait de ce que j’y ai trouvé. Ce n’est qu’une confusion perpétuelle de la gourmandise proprement dite avec la gloutonnerie et la voracité : d’où j’ai conclu que les lexicographes, quoique très-estimables d’ailleurs, ne sont pas de ces savants aimables qui embouchent avec grâce une aile de perdrix au suprême pour l’arroser, le petit doigt en l’air, d’un verre de vin de Laffitte ou du clos Vougeot.

Ils ont oublié, complétement oublié la gourmandise sociale, qui réunit l’élégance athénienne, le luxe romain et la délicatesse française, qui dispose avec sagacité, fait exécuter savamment, savoure avec énergie, et juge avec profondeur : qualité précieuse, qui pourrait bien être une vertu, et qui est du moins bien certainement la source de nos plus pures jouissances.

définitions.

Définissons donc et entendons-nous.

La gourmandise est une préférence passionnée, raisonnée et habituelle pour les objets qui flattent le goût.

La gourmandise est ennemie des excès : tout homme qui s’indigère ou s’enivre court risque d’être rayé des contrôles.

La gourmandise comprend aussi la friandise, qui