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Page:Physiologie du gout, ou meditations de gastronomie transcendante; ouvrage théorique, historique, et à l'ordre du jour, dédié aux gastronomes Parisiens (IA b21525699).pdf/293

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était plus avancée, ils emportèrent à Rome des préparations qui les avaient charmés chez les étrangers, et tout porte à croire qu’elles y furent bien reçues.

Les Romains avaient envoyé à Athènes une députation pour en rapporter les lois de Solon ; ils y allaient encore pour étudier les belles-lettres et la philosophie. Tout en polissant leurs mœurs, ils connurent les délices des festins ; et les cuisiniers arrivèrent à Rome avec les orateurs, les philosophes, les rhéteurs et les poëtes.

Avec le temps et la série de succès qui firent affluer à Rome toutes les richesses de l’univers, le luxe de la table fut poussé à un point presque incroyable.

On goûta de tout, depuis la cigale jusqu’à l’autruche, depuis le loir jusqu’au sanglier[1] ; tout ce qui peut piquer le goût fut essayé comme assaisonnement ou employé comme tel, des substances dont nous ne pouvons pas concevoir l’usage, comme l’assa-fetida, la rue, etc.

L’univers connu fut mis à contribution par les armées et les voyageurs. On apporta d’Afrique les pintades et les truffes, les lapins d’Espagne, les faisans de la Grèce, où ils étaient venus des bords du Phase, et les paons de l’extrémité de l’Asie.

  1. Glires farsi. — Glires isicio porcino, item pulpis ex omni glirium membro tritis, cum pipere, nucleis, lasere, liquamine, farcies glires, et sutos in tergula positos, mittes in furnum, an farsos in clibano coques.
    Les loirs passaient pour un mets délicat : on apportait quelquefois des balances sur la table pour en vérifier le poids. On connaît cette épigramme de Martial, au sujet des loirs, XIII, 59.

    Tota mihi dormitur hiems, et pinguior illo

    Tempore sum, quo me nil nisi somnus alit.

    Lister, médecin gourmand d’une reine très-gourmande (la reine Anne), s’occupant des avantages qu’on peut tirer pour la cuisine de l’usage des balances, observe que si douze alouettes ne pèsent point douze onces, elles sont à peine mangeables, qu’elles sont passables si elles pèsent douze onces, mais que si elles pèsent treize onces, elles sont grasses et excellentes.